Protection des secrets d’affaires, protection conditionnelle?
A la lecture de la Directive sur la protection des secrets d’affaires, l’on s’aperçoit que la protection qui est instaurée par le législateur est conditionnelle.
En réalité, et pour être plus précis, ce n’est pas la protection qui est conditionnelle, mais l’effectivité de cette protection à garantir par le juge.
En effet, tant l’article 11.2 (relatif aux mesures provisoires) que l’article 13 (relatif aux mesures de sauvegarde et mesures de substitution) disposent que le juge doit, avant de faire droit à une mesure destinée à garantir la protection d’un secret d’affaire, procéder à une balance d’intérêts ou, pour le dire autrement, à un test de proportionnalité.
Article 11.2:
Les États membres veillent à ce que les autorités judiciaires compétentes, lorsqu’elles décident s’il est fait droit à la demande ou si celle-ci est rejetée et qu’elles évaluent son caractère proportionné, aient l’obligation de prendre en considération les circonstances particulières de l’espèce, y compris, s’il y a lieu:
a) la valeur ou d’autres caractéristiques du secret d’affaires;
b) les mesures prises pour protéger le secret d’affaires;
c) le comportement du défendeur lors de l’obtention, de l’utilisation ou de ladivulgation du secret d’affaires;
d) l’incidence de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret d’affaires;
e) les intérêts légitimes des parties et l’incidence que l’octroi ou le refus de ces mesures pourrait avoir sur les parties;
f) les intérêts légitimes des tiers;
g) l’intérêt public; et
h) la sauvegarde des droits fondamentaux.
Article 13 :
Les États membres veillent à ce que, lorsqu’elles examinent une demande ayant pour objet l’adoption des injonctions et mesures correctives prévues à l’article 12 et qu’elles évaluent leur caractère proportionné, les autorités judiciaires compétentes soient tenues de prendre en considération les circonstances particulières de l’espèce, y compris, s’il y a lieu:
a) la valeur ou d’autres caractéristiques du secret d’affaires;
b) les mesures prises pour protéger le secret d’affaires;
c) le comportement du contrevenant lors de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires;
d) l’incidence de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret d’affaires;
e) les intérêts légitimes des parties et l’incidence que l’octroi ou le refus de ces mesures pourrait avoir sur les parties;
f) les intérêts légitimes des tiers;
g) l’intérêt public; et
h) la sauvegarde des droits fondamentaux.
En clair, en cas de violation d’un secret d’affaire, l’injonction ou le remède judiciaire sera loin d’être automatique.
On voit poindre la différence avec les droits intellectuels.
Les droits intellectuels sont des droits exclusifs, de sorte que, sauf abus de droit manifeste, si un droit intellectuel est violé, son titulaire a – automatiquement – le droit à de faire cesser la violation de son droit.
Il semble que la situation du propriétaire d’un secret d’affaire sera beaucoup moins confortable et certainement plus précaire: en cas de violation de son secret, il n’aura pas automatiquement le droit à une injonction ou un remède judiciaire.
Frédéric Lejeune, avocat au barreau de Bruxelles